Helsinki Art Museum

23.2.-12.8.2018

English: Gallery Guide

AIR DE PARIS est une exposition-promenade sur les pas de Leonard Bäcksbacka (1892–1963), dont une part significative de la collection est conservée au HAM. Fondateur de Taidesalonki en 1915, une importante galerie d’art à Helsinki, il fut un observateur privilégié de la scène artistique de l’Entre-deux-guerres.

Pour Bäcksbacka, Paris incarnait une modernité festive et jazzy. Les nombreuses amitiés nouées à Paris alimentèrent plusieurs expositions de sa galerie. De ces années jazz, Leonard Bäcksbacka retiendra  également une soif de couleur et une joie de vivre.

A la sortie du métro, prenez à droite : le Paris des années 1930 s’ouvrira à vous.


Yrjö Saarinen, Danse à Paris, 1930. Musée d’art de Hyvinkää
Yrjö Saarinen n’a jamais visité Paris. Lorsqu’il entreprend la peinture décorative du restaurant-dancing de Hyvinkää, c’est autant l’atmosphère du lieu que l’imaginaire du Paris des années 1930 qui l’inspire. Nocturnes et acides, les couleurs accompagnent les lignes brisées d’un rythme jazz. Les femmes libres et modernes, les cheveux courts et le regard charbonneux, le corps élancé et langoureux, apparaissent comme un phantasme de séduction. Saarinen opposera à cette Danse à Paris une Danse à Hyvinkää caricaturale, qui souligne le caractère mythique qu’occupe Paris dans l’esprit des artistes finlandais.

Jardins

Il est un lieu parisien que tout Finlandais connait sans même y être jamais allé : le jardin du Luxembourg. Le tableau d’Albert Edelfelt est si célèbre depuis la fin du XIXe siècle que l’on en vient à oublier combien le jardin parisien a été un sujet répandu.

Véritable havre de paix et de verdure dans la ville, il accueille discrètement les amoureux, permet de se rafraîchir à ses kiosques, aux enfants de se divertir grâce à ses attractions formidables : les petits bateaux, qu’ils font naviguer sur l’eau des bassins, et le théâtre de marionnettes de Guignol. Pour les peintres finlandais, peindre les jardins parisiens a été une manière de se confronter au maître, de témoigner leur révérence et leur différence stylistique et chromatique, de s’inscrire et de briser une tradition picturale.


Pension de famille

A Paris, Leonard Backsbäckä s’est vite créé ses habitudes. Il descendait toujours dans la même petite pension, discrète et familiale, qui lui donnait l’impression de vivre la vie d’un vrai Parisien. Arpentant la ville de part en part toute la journée, visitant galeries et musées, artistes en attente de réactions et de compliments, il aimait à se glisser dans la foule, à flâner dans les rues et sentir l’air du temps. Les trouvailles glanées dans la journée s’entassaient dans sa chambre, avant de prendre avec lui le chemin de la Finlande ; là elles conservaient un peu de nostalgie de ces visites, si fugaces et prégnantes à la fois. Un béret sur la tête, Leonard Backsbäckä prenait soin de son jardin, un peu ici, un peu ailleurs…


Rues de Paris
Markus Collin, Bouquinistes des bords de Seine, 1910. Photo: HAM/Hanna Kukorelli

Métamorphosé au XIXe siècle, Paris est devenu une ville minérale, où le gris de la chaussée, des façades de pierre et des toits de zinc ne vibrent que par temps de pluie, grâce aux reflets des éclairages de rue. L’effervescence de la ville tient à sa foule, à ses boulevards animés, à ses boutiques, ses cafés, ses théâtres. Le peintre de la vie moderne s’est mis à exagérer les perspectives, à saisir les anecdotes parsemant sa flânerie quotidienne. Au début du XXe siècle, avide de rythmes et de couleurs, il s’est emparé des affiches chamarrées qui prenaient possession de la rue, s’est étourdi de vitesse et de bruit.

Pour le visiteur finlandais, le pittoresque parisien apparaît souvent frénétique et fatigant, il se sent avalé dans son tourbillon, et la langueur des bords de Seine est un reposoir.

Leonard Bäcksbacka entretenait une correspondance assidue avec ses amis artistes parisiens. Pendant la guerre, plusieurs d’entre eux durent partir pour le front. La correspondance se poursuivit alors avec leurs familles. En février 1940, Emilienne Planson, l’épouse d’André Planson, écrit à Leonard Bäcksbacka que les oeuvres de son mari dorment et attendent que la vie continue. Elle explique que son mari est loin, et espère qu’ils auront un jour l’occasion de se retrouver, tous ensemble. Dans sa lettre, Emilienne envoie ses salutations également au peintre Yngve Bäck et à son épouse.

Cafés

Depuis la Révolution française, Paris est associé aux libertés individuelles. Même si la femme nordique est réputée plus libre que sa sœur latine, les artistes finlandais et leurs consœurs finlandaises jouissaient d’une grisante liberté loin des regards bien-pensants de leur entourage.

Indispensables pendant la Première Guerre mondiale, les femmes entendaient bien conserver leurs acquis et être présentes dans l’espace public urbain. Elles pouvaient s’attabler dans un restaurant ou un café, se maquiller ou fumer sans être pointées du doigt. Le plus souvent couvertes d’un élégant petit chapeau, les chevelures qui n’avaient pas été coupées à la garçonne ne se dénouaient encore que dans l’intimité.


Atelier

C’est par l’intermédiaire d’Yngve Bäck et de Birger Carlstedt que Leonard Backsbäckä a été introduit auprès d’un groupe de peintres français réunis sous l’appellation de Peintres de la Réalité poétique. Sans doute les visites d’atelier avaient-elles un accent bohème typiquement parisien, qu’il s’agisse de ceux des artistes français ou finlandais installés dans la capitale.

Séduit par les coloris vifs des tableaux, qui conservaient néanmoins une sage figuration, le marchand d’art finlandais s’est fait le « défenseur de l’Art français », achetant nombre d’œuvres, les exposants à Helsinki dans sa galerie à plusieurs reprises, et les faisant entrer dans les collections des musées. « Quand on habite le Nord comme moi, on aimerait bien avoir quelques belles choses pour réjouir son cœur », expliquait-il à son ami, le peintre Raymond Legueult.


Cirque

La multitude des salles de spectacles a toujours fait de Paris une ville de loisirs incomparable. Plus que le théâtre ou l’opéra, c’est le music-hall populaire et le cirque que Leonard Bäcksbacka appréciait tout particulièrement, tout comme nombre d’artistes de l’époque. Coloré et exubérant, le cirque réservait des émotions fortes avec ses acrobates et ses trapézistes, faisait rire avec ses clowns mais surtout, il présentait des animaux dressés et parfois exotiques, provenant des colonies lointaines.