Musée Jacquemart-André, Paris

11.3.-25.7.2022

Commissaires de l’exposition : Laura Gutman et Pierre Curie

Scénographie : Hubert le Gall

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La Presse en parle

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Les débuts naturalistes

La relation du peintre Akseli Gallen-Kallela (1865-1931) à la nature finlandaise est au cœur de l’exposition. A ses débuts naturalistes, elle s’articule dans une association étroite des paysages et des paysans. Par l’usage d’une palette colorée bistre homogène, les figures se fondent dans leur environnement. Gallen-Kallela part à leur rencontre à l’intérieur des terres et donne une place essentielle aux paysans, intrinsèquement liés à leur terre.

Lorsqu’il se saisit de la légende du Kalevala, les paysages finlandais se voient peuplés de figures mythologiques aux traits empruntés à la paysannerie locale. Le triptyque de La Légende d’Aïno, destiné à clore ses études artistiques à Paris avec une oeuvre majeure à l’Exposition universelle de 1889, est à ses yeux un échec – il renoncera à exposer son chef-d’œuvre à Paris. Il admet que l’utilisation d’un style naturaliste quasi-photographique ne convient pas à l’esprit légendaire du Kalevala.

Kalela, la maison-atelier

La maison que l’artiste se fait construire au fond des forêts, à Ruovesi, dit sa volonté d’immersion dans la nature. Kalela est à la fois le lieu de la création et le sujet de l’œuvre, un refuge contre la vie moderne et un observatoire sensible de son environnement. Dans un désir de restituer un monde total, non contaminé par la civilisation, Akseli Gallen-Kallela et sa femme Mary, bientôt entourés d’une cohorte d’élèves, réinventent leur mode de vie. Dans la lignée de la Red House de William Morris, architecture et décoration intérieure sont traitées en œuvres d’art.

L’installation à Kalela correspond au moment d’une expérimentation nouvelle de la gravure et du vitrail, mais aussi au deuil du premier enfant. La maison apparaît élevée au-dessus des hommes, dans une vision Nietzschéenne, mais aussi comme un lieu de repli vers une intériorité meurtrie.

Botaniques

Etudiées avec une minutie de botaniste pour l’ornementation du mausolée de la petite Sigrid Jusélius à Pori, les plantes recèlent un message mystique. Le motif de la fleur coupée évoque ainsi la vie de la jeune fille fauchée trop tôt, à l’instar de celle de son propre enfant.

L’énigmatique Molène barrant le visage d’une jeune fille questionne le sens de la vie, à la manière du point d’interrogation qu’affecte la plante, ponctuée par une bague.

Mythologies

Le mythe du Kalevala permet à Akseli Gallen-Kallela de traverser la nature et de pénétrer un espace invisible, pérenne et éloigné. La nuit indique l’extinction des sens naturels et l’éveil de la perception d’un espace surnaturel. Une attention particulière est apportée à la respiration, à l’inspiration, qui évoque la découverte du concept hindouiste du prana – le souffle de vie.

Cosmos

La projection de figures extatiques dans un espace cosmique s’appuie tant sur des observations scientifiques que sur des conceptions ésotériques répandues à l’époque. La théorie de l’Harmonie des sphères de Ptolémée, réinterprétée à l’aune du bouddhisme, suscite la vision d’un orgue céleste diffusant une musique dans l’espace. La réincarnation de l’âme s’opère quant à elle au travers d’une traversée de l’espace vers un astre lumineux.

Paysages de silence

L’absence de personnages dans l’espace immaculé de la neige hivernale souligne l’aboutissement du parcours du peintre, qui efface toute médiation avec la nature. Habités par une puissance mystique, les paysages de neige de Gallen-Kallela sont bien davantage qu’un coin de nature. Les pas d’un lynx évoquent cette présence-absence et invitent à se laisser subjuguer par la beauté intense de la nature.

Reflets

Akseli Gallen-Kallela préfère au paysage de l’archipel celui des lacs, à l’intérieur des terres de la Finlande. Le jeu des reflets du ciel dans l’eau renvoie à l’existence d’une dimension cachée, double du monde visible. L’intensité de la lumière et l’étendue des variations picturales éblouissent et transportent dans un paysage finlandais à la fois accessible et transmis avec un talent incomparable.